Dans la profusion des sorties mensuelles, ne retenons que quelques chansons….
Etienne Daho, Les chansons de l'innocence retrouvée (Polydor/Universal Music)
Au fil d'un répertoire érudit qui a autant murmuré le noir désarroi que le feu de la passion, les désillusions fatales que les obsessions destructrices et les errances, Etienne Daho s'est mué en dandy tout désigné de la pop française. Pour son album du retour, le onzième depuis Mythomane (1981) produit par feu Jacno, le chanteur rallume son penchant pour les clairs-obscurs.
En se référant aux Chants de l'innocence et de l'expérience de William Blake, il convoque d'emblée enfer et paradis poétique. Pourtant, au regard des noirceurs introspectives de L'Invitation voilà six ans, Les chansons de l'innocence retrouvée s'avèrent moins un pont des soupirs qu'un jardin du plaisir.
En ravivant une pop classieuse et ample, ces arrangements si chers à Michel Legrand ou John Barry, Daho parvient à donner de l'air à ses habituelles langueurs mélancoliques. Sa prose plus plombée thématiquement, qui évoque destins brisés, exil clandestin (superbe « Un nouveau printemps »), doutes métaphysiques, paradis perdus ou amours contrariées, s'y délaie aisément. Hormis un titre d'une belle froideur synthétique (la concision à effet miroir d'« En surface » co-signé avec Dominique A), c'est ainsi un Daho charnel qu'on redécouvre.
Entre perles éclatantes (« Le baiser du destin » ou « L'homme qui marche ») et faux bijoux (l'exercice stylistique qu'est « La peau dure » ou les ficelles discoïdes des « Chansons de l'innocence retrouvée »), ce disque riche en invités de marque (Nile Rodgers ou Debbie Harry) ne brille pourtant vivement que par intermittence. Un tableau clair-obscur en somme.