Dans la profusion des sorties mensuelles, ne retenons que quelques chansons...
De son repaire des montagnes auvergnates, dans une ferme à 40 kilomètres de Clermont-Ferrand, Jean-Louis Murat a trouvé de nouveaux complices de jeu avec The Delano Orchestra. En voisins inspirés comme lui par les codes classieux d'une certaine folk-pop-rock anglo-américaine, le petit orchestre de cordes et cuivres élargit son champ/chant d'horizon. Après l'économe et relativement plat Toboggan (2013) en mode guitares-claviers, Babel permet donc au barde proclamé et désormais attitré de reprendre de la hauteur. Et à ses nouvelles belles-lettres rock d'acquérir une épaisseur et ampleur inédites.
En vingt chansons comme autant de précis poétiques toujours stylisés, Murat brosse un tableau désenchanté du monde. A commencer par sa campagne à l'agonie (magnifique « Chacun vendrait des grives ») dont la chronique ouvre ce double album partagé entre mélancolie et sourires en coin. Le naturalisme impressionniste du lexique, parfois ancré dans un terroir très limitrophe, n'empêche point d'évoquer des destinées humaines offensées, fracassées ou mises à mal (« Le jour se lève sur Chamablanc », « Neige et pluie au Sancy », Col de Diane»). Entre les lignes de fuite du paysage, les marécages de l'âme peinée (« Chagrin violette », « Mujabe ride »), l'histoire de la région (« Noyade au Chambon ») affleurent aussi. Le versant sensuel de Murat n'a pas pour autant disparu au grand air et des titres comme « Tout m'attire » et «J'ai fréquenté la beauté » évoquent admirablement l'amour.