Dans la profusion des sorties mensuelles, ne retenons que quelques chansons...
Marcel Kanche, Vigiles de l'aube (Cristal Records)
Le précieux et discret chanteur, plume de M et Paradis, enchante encore avec les morsures rock de ce septième album.
Pour les souffle et les soupirs de « Vigiles de l'aube », chanson phare qui éclaire de sa grâce mélancolique ce septième album, un nouveau détour par les humeurs vagabondes et les clair-obscurs de Marcel Kanche s'impose. D'autant que la chanson, destinée à son défunt frère d'âme Alain Bashung qu'il a parfois côtoyé sur scène comme en studio et auquel il a soumis des textes dix ans durant, répand son venin rock et poétique sur plus de six minutes.
Ailleurs, Vigiles de l'aube alterne encore morsures au point du jour et fulgurances nocturnes à travers des couplets oniriques. L'ivresse des résonances, la magie des assonances et le vertige des lenteurs n'ont pas quitté Kanche. Si l'art pictural murmuré-chanté du Français ne s'est toujours pas fait connaître plus loin à la ronde en un quart de siècle malgré deux tubes pop livrés sur un plateau à M (« Qui de nous deux? ») et Vanessa Paradis (« Divine idylle »), rien ne saurait perturber sa précieuse science lexicale. Où failles, désarrois et solitudes se disputent les métaphores entre rivière, marécage ou boue. Autant de terrains glissants ou détrempés que sa plume tanguant entre éclaircies et éclipses investit de profonds états d'âme.
Quelques chansons majestueuses aux titres étranges comme « Pensées de brindille », « Et dans la boue semé », « Buveurs de marécages » ou « Où est la lande? » se distinguent encore au coeur de cette forêt humide pleine de contradictions, d'hésitations et de sentiments ardents. De telles splendeurs fragiles n'ont pas de prix.