Dans la profusion des sorties mensuelles, ne retenons que quelques chansons...
Brigitte Fontaine, J'ai l'honneur d'être (Silene-Decca)
Après un ravalement de façade de son répertoire volontiers surréaliste, baroque, fantaisiste, libertin, grossier ou vindicatif, opéré principalement en duo (L’un n’empêche pas l’autre, 2011), Brigitte Fontaine revient avec un album original à l’intitulé égocentrique trompeur. J’ai l’honneur d’être étant plutôt un bouquet de chansons truffé d’épines.
Débutant sous de sombres auspices avec «Camisole de force/Relookée Crazy Horse/Je m’appelle Lola/Je suis une paria», ce dix-huitième album de l’éternelle anticonformiste offre une série de portraits et de confessions aux humeurs changeantes. La chanteuse française, qui aime à varier les costumes depuis son premier manifeste soixante-huitard, Brigitte Fontaine est folle, envoie savoureusement Dieu au diable, conte crûment les vertiges de l’amour et du sexe («Delta», «Les Hommes préfèrent les hommes»), se glisse dans la peau d’une cruelle «Pythonisse», égrène ses pêchés mignons et détestations («J’aime»). Mais sous la provocation, l’émotion et la tendresse affleurent pourtant plus souvent. A l’image de la somptueuse mise à nu sentimentale de «Père».
Si la voix de ces parlé-chanté n’est logiquement plus très bien assurée au regard de ses 74 ans, Fontaine continue de toucher par des textes poignants soigneusement orchestrés et arrangés par son fidèle compagnon Areski Belkacem. Par touches expressionnistes, il accompagne finement le verbe informel et affranchi de sa muse historique.
Cette chronique est aussi parue dans le quotidien suisse Le Courrier du 5.10.2013