Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

in the garden

  • Solo fatal

    Mano Solo, un chagrin lancinant

    Le chanteur aux noires colères s'est tu. D'une suite de ruptures d'anévrisme à l'aube du dimanche 10 janvier. Et c'est une rencontre au printemps 2007 qui remonte à la surface en même temps que la tristesse. C'était au temps d'un concert au Printemps de Bourges et du biennommé In The Garden, un neuvième album aux états d'âme moins plombés, où la légendaire rage au ventre de Mano Solo était atténuée par d'inédits élans de tendresse. Enregistrées dans son bout de jardin de la périphérie parisienne, «dans la détente et l'improvisation», ces douze chansons sensuelles osaient à nouveau les corps-à-corps amoureux, imaginent parfois un futur plus radieux. Autant de lueurs d'espoir que la séropositivité précoce de Mano Solo avaient peut-être fini par bâillonner.

    «Y'a pas que des histoires pourries/Que des histoires d'ennui/Y'a pas que des statues qui pleurent/Y'a pas que des erreurs pour toujours/Dans ma mémoire» ou «Si tu savais tous les bonheurs auxquels je voudrais laisser la place», chantait désormais le fils du dessinateur satirique Cabu, qui ne s'est pas encore résolu à l'optimisme béat, sans nuances. Au départ pourtant, l'ancien punk et peintre qui avait surgi dans le paysage chanson avec La Marmaille Nue en 1993, voulait réaliser un album «déglingué, baroque et dissonant à la Tom Waits. Mais l'imitation ne fonctionnait pas, la mélodie finissait toujours par nous rattraper». Un accordéon, un piano et une guitare dessinent les contours parfois tango d'une partition qui a évacué la batterie pour gagner en souplesse rythmique et légèreté mélodique. «Cela nous a apporté une liberté formelle folle. Même vocalement et textuellement, on a pu se recentrer autour d'une énergie pure. Sur scène, j'apprécie aussi cette fragilité, cet équilibrisme, qui me rappelle les happenings des concerts de mes débuts», détaillait Solo.

    Même les paroles d'In The Garden, l'homme en noir les a imaginées dans le même état d'esprit, de manière improvisée. «De toute façon, je n'écris plus à l'avance. Les textes me surprennent. Une ambiance, un souvenir me suffisent pour inspirer une histoire. La plupart du temps, je ne me souviens plus comment les chansons sont nées. Sauf à mes débuts solitaires à Toulouse, où j'écrivais entre deux tableaux que je peignais sur ma péniche.»

    C'était l'époque du choc littéraire avec Blaise Cendrars pour Mano Solo. «La Marmaille Nue», nom de son premier groupe, du premier album et de son label est en effet emprunté à un poème de l'écrivain suisse. «L'écriture de Cendrars a été un véritable déclencheur et m'a fait acheter une machine à écrire. Le franc-parler de Cendrars, sa liberté de narration m'ont ouvert les yeux, l'imaginaire et libéré l'écriture. Du coup, je me suis constitué une réserve de textes, un petit trésor de guerre. C'est d'ailleurs pour ça que mon deuxième album, Les Années sombres, comportait dix-sept chansons. Dès qu'une musique passait et qu'elle me faisait penser à un texte, il suffisait que je pioche dans le stock.»

    Rentrer au port s'intitule son ultime album paru l'automne dernier. Voilà qui est fait. Et nous de nous replonger dans l’univers des chagrins lancinants de Mano Solo. Avec encore plus d'émotion.